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Article
Effectifs de l’entreprise : les cas d’exclusion restent applicables
Effectifs de l’entreprise : les cas d’exclusion restent applicables
L’article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (Charte UE) ne peut être invoqué dans un litige entre particuliers afin de laisser inappliqué l’article L. 1111-3 du code du travail, contraire au droit de l’Union en ce qu’il exclut du calcul des effectifs de l’entreprise des catégories de travailleurs.
par Bertrand Inesle 21 février 2014
L’article L. 1111-3 du code du travail exclut du calcul des effectifs de l’entreprise un certain nombre de travailleurs salariés ayant conclu des contrats de travail destinés à assurer leur formation ou leur insertion sur le marché du travail. L’exclusion des effectifs, à laquelle il est procédé, semble discutable, d’une part, parce qu’il ne place pas tous les salariés dans la même situation et, d’autre part, parce qu’en évitant le franchissement des seuils d’effectifs établis par la loi et le règlement, certains employeurs échappent à la mise en place d’institutions représentatives du personnel et/ou d’une représentation syndicale dans l’entreprise. Ces critiques ont été relayées en justice, conduisant à la saisine, à deux reprises, de la Cour de cassation. Une première fois, à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité qu’elle a renvoyée au Conseil constitutionnel, lequel a affirmé la conformité de la disposition précitée à la Constitution (Cons. const., 29 avr. 2011, n° 2011-122 QPC ; Dalloz actualité, 7 févr. 2011, obs. M.-C. de Montecler ; ibid. 2622, obs. P. Lokiec et J. Porta ; Constitutions 2011. 373, obs. C. Radé ). Une seconde fois, dans le cadre du même litige, concernant une éventuelle contrariété des cas légaux d’exclusion des effectifs avec le droit de l’Union européenne et, plus particulièrement, l’article 3 de la directive n° 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs. La Cour décida de surseoir à statuer et de renvoyer à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) une question préjudicielle (Soc. 11 avr. 2012, n° 11-21.609, Bull. civ. V, n° 122 ; R. p. 479 ; Dalloz actualité, 19 juill. 2012, obs. L. Perrin ; ibid. 2622, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RTD eur. 2013. 292-28, obs. B. Le Baut-Ferrarese ; ibid. 292-31, obs. S. Adalid ; Sem. soc. Lamy 2012, n° 1535, note S. Laulom).
Comme les commentateurs de l’arrêt de la chambre sociale l’avaient remarqué (L. Perrin, préc. ; J. Porta, préc.), l’incompatibilité de l’article L. 1111-3 du code du travail avec la directive précitée ne faisait aucun doute. Bien que la Cour ait considéré ce point pour acquis, la CJUE reprend succinctement la position qu’elle a elle-même adoptée quelques années plus tôt : l’information et la consultation des salariés se réalisant par l’intermédiaire de leurs représentants, l’article 3 de la directive n° 2002/14 s’oppose à une réglementation nationale qui exclut, fût-ce temporairement, une catégorie déterminée de travailleurs du calcul des effectifs de l’entreprise (CJCE 18 janv. 2007, CGT, aff. C-385/05, pts 34 et 41 ; D. 2007. 776 , note V. Bonnin ; ibid. 435, obs. E. Pahlawan-Sentilhes ; JCP S 2007. 1082, note B. Gauriau ; Europe 2007. Comm. 93, note L. Idot).
La question centrale était alors de savoir s’il était possible d’invoquer directement l’article 27 de la Charte UE afin d’évincer l’application de l’article L. 1111-3 du code du travail (L. Perrin, préc. ; J. Porta, préc.).
C’est sur ce point que se focalise la Cour de justice. Cette dernière examine néanmoins préalablement l’invocabilité de la directive. L’invocabilité d’éviction n’est, en effet, admise qu’autant que le juge national ne parvient pas à appliquer la directive, directement ou au moyen d’une interprétation conforme du droit national à celle-ci (CJCE 18 déc. 2007, Frigerio Luigi & C. Snc, aff. C-357/06, pt. 29 ; CJUE 22 déc. 2010, Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, aff. C-44/09 et C-456/09, pt 73 ; 24 janv. 2012, Dominguez, aff. C-282/10, pt 23 ; Dalloz actualité, 24 févr. 2012, obs. L. Perrin ; ibid. 901, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RDT 2012. 371, obs. M. Véricel ; ibid. 578, chron. C. Boutayeb et E. Célestine ; RFDA 2012. 961, chron. C. Mayeur-Carpentier, L. Clément-Wilz et F. Martucci ; RTD eur. 2012. 490, obs. S. Robin-Olivier ; ibid. 2013. 677, obs. F. Benoît-Rohmer ; JCP S 2012. 1135, note E. Andréo et J. Misslin ; V. égal., sur la subsidiarité de l’invocabilité d’éviction, E. Dubout, L’invocabilité d’éviction des directives dans les litiges horizontaux. Le « bateau ivre » a-t-il sombré ?, RTD eur. 2010. 277 ). La CJUE relève que l’obligation faite aux États membres...
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